Après avoir accompagné SOS Racisme à ses débuts, Serge Malik revient aujourd’hui à la cause de l’immigration, au sein d’une société visant à aider les jeunes de Seine-Saint-Denis à entreprendre.
«Yump », pour « Young Urban Movement Project » – mais aussi une façon
d’exprimer fortement son approbation
en anglais. Dans un café du 9e arrondissement, Serge Malik, bientôt 60 ans,
phrasé méditerranéen et blouson de cuir,
s’escrime à bien décliner le nom de son
nouveau projet : une école privée inspirée
d’un modèle suédois. L’idée est d’offrir à
des jeunes de Seine Saint-Denis une année de formation afin qu’ils puissent
lancer leur entreprise. « Nous avons fait
une étude de marché. Il y a beaucoup de
bonnes initiatives, des aides, du microcrédit, de la formation, mais tout cela n’est
jamais réuni. Nous voulons constituer ce
chaînon manquant ». Plutôt que des entreprises de « survie », Serge Malik et ses
associés, le rappeur Axiom et le diplomate
suédois Tomas Fellbom, affirment vouloir
pousser les jeunes à créer des entreprises
moyennes à forte valeur ajoutée, innovantes et créatrices d’emploi. « Nous voudrions déclencher en France
le “pourquoi pas moi ?” chez des jeunes de
banlieue. Ils débordent de projets sans avoir
assez d’assurance et de moyens pour les
réaliser », affirme ce conseiller en communication, qui a créé il y a plusieurs années
sa propre agence. Pour l’heure, il lui faut
encore boucler le budget. Sur les 800 000 €
nécessaires, il lui en manque 300 000. « Les
entrepreneurs nous disent : on a déjà nos
pauvres, ironise-t-il. Ils ne croient pas aux
capacités des banlieues. Pourtant, ils ont
tous signé la charte de la diversité ».
Serge Malik, juif par sa mère et musulman par son père, est né à Lyon en 1954 de parents algériens. Il décrit son enfance, contemporaine de la guerre d’Algérie, comme un cauchemar : « J’ai été martyrisé par mes professeurs. » Déchiré entre Israël et la Palestine, la kippa et le keffieh, le jeune homme se cherche une identité. Il résout ce dilemme en s’engageant à corps perdu dans SOS Racisme. Quelques mois plus tard, il rompt avec l’association de manière fracassante, jugeant le mouvement manipulé par les conseillers de François Mitterrand à l’Élysée, une dénonciation qu’il explicitera cinq ans plus tard dans un livre à charge, Histoire secrète de SOS Racisme (1). Journaliste, il ouvre une maison d’édition, Binôme. Collectionneur, il se consacre à l’art contemporain et organise des événements artistiques en lien avec les ouvrages qu’il publie, comme l’exposition « Pique-nique » au centre Pompidou (2001). Son idée : rapprocher le monde de la culture et celui de l’entreprise : « Les artistes repoussent les marges, franchissent les conventions, révolutionnent les valeurs. Beaucoup d’entreprises pensent que c’est contraire à leurs intérêts, à la création de valeur ajoutée ». Serge Malik mentionne un exemple à l’étranger : celui de Lhoist, leader de la production de chaux, qui a ouvert à ses employés sa collection d’œuvres. « La plupart des dirigeants des sociétés n’ont que deux mots à la bouche : innovation et formation. Or ils embauchent des gens qui sortent du moule des grandes écoles. J’aimerais ajouter à l’entreprise la pincée de sel qu’est l’artiste ». Il organise aussi des visites de musées ou de collections pour des chefs d’entreprise.
À la recherche de talents des cités, il a un temps entretenu l’espoir de monter un conservatoire des cultures urbaines, reconnaissant aux arts de la rue leur valeur. Avec YUMP, Serge Malik compte lutter contre les « discriminations » par l’exemplarité. « Dans les cités, Jamel Debbouze, Anelka sont considérés comme des héros, affirme-t-il. Mais ces jeunes ne devraient-ils forcément réussir que par le football ou l’humour ? Il faut les mêmes exemples dans l’économie. C’est cela qui permettra de changer le regard sur les immigrés. »
Rapprocher les mondes
Serge Malik, juif par sa mère et musulman par son père, est né à Lyon en 1954 de parents algériens. Il décrit son enfance, contemporaine de la guerre d’Algérie, comme un cauchemar : « J’ai été martyrisé par mes professeurs. » Déchiré entre Israël et la Palestine, la kippa et le keffieh, le jeune homme se cherche une identité. Il résout ce dilemme en s’engageant à corps perdu dans SOS Racisme. Quelques mois plus tard, il rompt avec l’association de manière fracassante, jugeant le mouvement manipulé par les conseillers de François Mitterrand à l’Élysée, une dénonciation qu’il explicitera cinq ans plus tard dans un livre à charge, Histoire secrète de SOS Racisme (1). Journaliste, il ouvre une maison d’édition, Binôme. Collectionneur, il se consacre à l’art contemporain et organise des événements artistiques en lien avec les ouvrages qu’il publie, comme l’exposition « Pique-nique » au centre Pompidou (2001). Son idée : rapprocher le monde de la culture et celui de l’entreprise : « Les artistes repoussent les marges, franchissent les conventions, révolutionnent les valeurs. Beaucoup d’entreprises pensent que c’est contraire à leurs intérêts, à la création de valeur ajoutée ». Serge Malik mentionne un exemple à l’étranger : celui de Lhoist, leader de la production de chaux, qui a ouvert à ses employés sa collection d’œuvres. « La plupart des dirigeants des sociétés n’ont que deux mots à la bouche : innovation et formation. Or ils embauchent des gens qui sortent du moule des grandes écoles. J’aimerais ajouter à l’entreprise la pincée de sel qu’est l’artiste ». Il organise aussi des visites de musées ou de collections pour des chefs d’entreprise.
Debbouze et Anelka, des héros
À la recherche de talents des cités, il a un temps entretenu l’espoir de monter un conservatoire des cultures urbaines, reconnaissant aux arts de la rue leur valeur. Avec YUMP, Serge Malik compte lutter contre les « discriminations » par l’exemplarité. « Dans les cités, Jamel Debbouze, Anelka sont considérés comme des héros, affirme-t-il. Mais ces jeunes ne devraient-ils forcément réussir que par le football ou l’humour ? Il faut les mêmes exemples dans l’économie. C’est cela qui permettra de changer le regard sur les immigrés. »
Elsa Sabado
Publié le 25 mai 2012 dans La Croix
Publié le 25 mai 2012 dans La Croix
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